21e siècle. À l’ère de la performance à tout prix, de la surconsommation, du culte de la perfection et de l’innovation. Un monde occidental où industries et multinationales mènent la société par l’univers médiatique et la publicité. Pour une génération où diktats de société riment avec beauté. C’est le triste culte d’un physique parfait, plastique, prédéterminé.
La minceur attire. La minceur dérange. La minceur obsède.
Notre société associe un corps mince à la volonté, à la séduction et au succès, tandis que le surpoids est perçu comme un signe de paresse et de lâcheté. C’est la dictature de la minceur, devenue omniprésente partout dans les médias et les publicités. Un exemple des plus flagrants de ce phénomène est le dernier scandale provoqué par la compagnie de vêtements suédoise H&M. Celle-ci a affiché sur son site des photos de mannequins présentant ses différents produits. Fait curieux, tous les corps, parfaitement minces, semblaient tous être identiques, mise à part la couleur de la peau. La compagnie a fini par avouer que les modèles ne se trouvaient non pas être de vraies femmes, mais bien de simples corps de synthèse générés par ordinateur, sur lesquels avait été collée l’image du visage d’un vrai mannequin. (!!!!!!!)
Est-ce là notre vision de la beauté en Amérique du Nord? De pâles copies conformes de tous et chacun, lesquelles sont de plus créées par ordinateur tellement notre idéal de perfection est devenu stricte. Ainsi, on ne peut ni se surprendre ni blâmer une génération de jeunes filles et de femmes qui, pour la majorité, ne sont jamais entièrement satisfaite de leur apparence ou bien de leur poids. Le message que notre société leur envoie via des campagnes publicitaires comme celle de H&M et de bien d’autres encore ne peut se traduire autrement que par un désir constant, qu’il soit conscient ou non, de la maîtrise absolue de son propre corps et de l’atteinte du poids idéal. Combien de fois a-t-on entendu une femme de notre entourage dire qu’elle ne peut se permettre tel ou tel aliment, ou bien, encore plus subtil, mais tout aussi réel, en entendre une autre dire qu’elle peut se permettre de manger un certain repas, du fait qu’elle n’a justement pas de problème de poids. Tout compte fait, c’est plus de 50% des femmes ayant atteint leur poids santé qui désirent tout de même maigrir.
Il faut prendre conscience que l’idée de ce corps qui répond aux attentes déformées de notre génération est présente dans l’esprit de chaque femme, affectant ainsi d’une manière ou d’une autre sa qualité de vie. Et cela dans l’intérêt de qui? Nombreuses seront celles qui diront que c’est pour leur propre satisfaction et leur estime personnelle…
En réalité, cette situation est invariablement reliée à l’immense industrie tournant autour de l’image corporelle. Il est question ici de compagnies de prêts-à-porter, de cosmétiques, de produits amaigrissants et de santé, de centres de conditionnement physiques et j’en passe. Ces propriétés capitalistes, pour la plupart américaines, réussissent à réaliser des profits astronomiques grâce à cette obsession de la minceur qu’elles ont créée, puis alimentée par la publicité, et par laquelle une majorité de femmes et de jeunes filles sont maintenant concernées.
Comme le déclare Naomi Wolf dans son livre The Beauty Myth (Quand la beauté fait mal, en français) : «Une fixation culturelle sur la minceur féminine n’est pas l’expression d’une obsession de la beauté féminine, mais de l’obéissance féminine.»
C’est à croire que nous, les femmes, qui nous sommes battues pendant des années afin d’acquérir nos droits d’égalité et de liberté, serions maintenant victimes et prisonnières de nos propres corps? Chacune d’entre nous doit prendre conscience du non-sens de cette situation, qui n’est qu’une arnaque du monde capitaliste dans lequel nous évoluons, pour ainsi nous placer au-dessus de celle-ci.
Bien sûr, la culture dans laquelle on vit nous dictera toujours un certain modèle de beauté à suivre, cela en est le cas pour n’importe quelle société du monde. L’important est toutefois de poser un jugement personnel afin de parvenir à voir la vraie beauté, non pas celle fade et artificielle d’une simple image corporelle, mais bien celle que l’on voit au-delà, à travers la diversité et l’unicité des gens. Car l’apparence d’une personne n’est qu’une infime part de sa nature, celle-ci étant largement complétée par sa présence, sa manière de parler, d’agir, sa personnalité, sa conception de la vie et son histoire. Et c’est cette part d’une personne, irrémédiablement reliée à son aspect physique, qui va venir confirmer la première impression, suscitée par son apparence, de par sa beauté ou sa laideur morale.
Ce n’est donc plus un cliché lorsqu’on dit que ce qui compte, c’est la beauté intérieure.
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Photo: We Heart It