J’ai le blues de l’automne.
L’autre fois, j’attendais à la caisse au IGA. J’écoutais la jeune fille en avant, pas plus vieille que moi, parler de sa petite sortie aux pommes en amoureux à la caissière. Je me suis dit que jamais, jamais, je ne vais amener mon copain aux pommes tant qu’on n’aura pas nos huit enfants et notre chien.
Je me disais, ce jour-là, que c’est parce qu’on va avoir fait tout le Kama Sutra pour pimenter notre vie de couple et qu’on va être rendus à se trouver des pépins pour plus faire l’amour. Comme quoi, on n’est pas encore rendus là.
On est trop jeunes pour se balader main dans la main au travers des pommiers et s’obstiner sur quelle sorte de pommes est la meilleur (c’est la McIntosh).
Aller aux pommes, ça fait trop automne.
Sauf que j’ai quand même acheté ma première citrouille, parce que tout le monde fait ça en octobre. J’ai même acheté une courge, le légume qui a une drôle de forme. Je n’ai jamais cuisiné ça de ma vie, je sais même pas comment le couper, sauf que tout le monde en achète, à l’automne.
Alors ce vendredi soir-là, j’ai préféré refuser toute invitation à sortir pour venir à bout de ma courge.
– Est-ce que tu sors ce soir? m’a demandé une amie, puisque c’est normal de sortir un vendredi soir quand tu as 19 ans et que t’habites plus chez tes parents.
– Non désolée, je suis fatiguée, j’ai dit. Ma courge m’attend, c’est une bonne excuse.
Ou peut-être aussi parce qu’il faisait trop froid pour marcher jusqu’au bar. La brise d’octobre est assez aguicheuse pour que je doive mettre des collants avec ma petite robe, sauf que j’ai déjà dépensé 50$ en collants ce mois-ci (et en produits dérivés de la citrouille). Je n’ai même pas eu le temps de mettre un pied dehors qu’ils étaient déjà troués et déchirés. Résultat : j’ai le nez qui coule, les yeux rouges et une voix d’homme.
Finies les robes à l’automne, l’été c’est fini depuis un boute. (Surtout au Saguenay.)
Alors, non. Je ne suis pas sortie. J’ai remplacé le vin par un thé à la citrouille dans ma tasse avec des pommes du DavidsTea.
J’ai le blues saisonnier, mais en avance sur tout le monde. Moi, c’est pas à l’hiver, mais à l’automne.
Alors j’écoute du Kaïn pour passer à travers. Le problème avec les chansons de Kaïn? Ça me rappelle juste, au final, à quel point je suis aussi quétaine que les autres à l’automne.
Mon amour, je sais que tu vas lire ce texte, alors est-ce que tu veux m’amener aux pommes? Oui, aux pommes! Embarque-moi dans ta belle Mazda et on va rouler jusqu’à Rougemont. Je ne veux pas qu’on soit comme Adam et Ève, pas que je sois gênée de me promener nue. Je veux qu’on soit comme tous ces couples quétaines. Je voudrais que tu sois mon super héros de la pomme, juste pour que tu comprennes c’est quoi mettre des collants. Bref, je veux aller aux pommes.
Et j’veux que tu m’amènes boire un maudit café à saveur de citrouille au Starbucks.
Automne, t’es la saison que je déteste le plus. T’es ma saison préférée.
Photo: Sarah Horrigan via Flickr