Combien de grains de sable se sont écroulés du sablier avant qu’Il te tende sa grande main? As-tu souffert quand le marchand de sable a laissé tomber, pour une dernière fois, sa poussière magique sur tes paupières? Le flux de lumière qui a émané du tunnel t’a-t-il aveuglée ?
Lorsque les rayons du soleil caressent ma peau, je t’imagine dansant au rythme du vent. Je suis tes mouvements grâce aux trainées blanches que tu laisses derrière toi. Celles qui zèbrent le ciel.
Lorsque la lune illumine le ciel, je t’imagine virevoltant dans la voûte céleste à la recherche de l’endroit parfait où t’établir. Au loin, tu aperçois Sirius. Tu rêves d’un jour resplendir comme elle le fait.
Ton périple a dû s’étendre sur plusieurs jours, puisqu’entre ici et là-haut se trouve un nombre infini de kilomètres. Un nombre infini de promesses inachevées.
Je t’imagine devant les immenses portes dorées qui mènent directement au Paradis. De l’autre côté du portail, Il t’attend, avide de faire ta connaissance. D’ailleurs, Il te regardait depuis un bon moment du haut de son trône lorsque tu étais avec nous, ici-bas.
Dès l’instant où une de mes pensées t’est adressée, j’imagine que les poils sur tes bras se dressent et qu’un petit frisson parcourt ton échine. Je m’excuse : tu dois souvent frémir.
Lorsqu’Il te souhaite la bienvenue, tu te sens bien. Tu te sens libérée. Sur Terre, tu as laissé toute ta souffrance, tes regrets, tes peines et tes peurs. Tu as troqué ces sentiments dévastateurs, rongeant tous les vivants, contre bien-être, satisfaction, béatitude et bravoure. La maladie n’existe pas là-haut. Les mensonges et la malice non plus.
Je t’imagine en train de jouer aux cartes avec ta grand-mère et ton arrière-grand-père. Toi qui pensais ne jamais les revoir. C’est pourtant avec un large sourire qu’ils t’ont accueillie et qu’ils t’ont ouvert les bras.
À l’heure qu’il est, des ailes ont sans doute émergé entre tes clavicules faisant de toi un véritable ange. Tu dois briller de mille feux.
La vérité c’est que je t’imagine heureuse pour apaiser ma tristesse.
Il y a un an, on marchait main dans la main, dans la même direction. Trois-cent-soixante-cinq jours plus tard, je marche seule. Je sais toutefois que ma solitude n’est que physique, puisque tu continues de guider mes pas par-dessus mon épaule.
J’ai hâte d’à mon tour flotter jusqu’à toi, te serrer dans mes bras et te dire à quel point tu m’as manqué.
Parce qu’Il est venu te chercher trop tôt, je n’étais pas prête.
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