Gang, on est privilégié. C’est vrai, on a le temps de chiller au McDo, de faire la grève, de tout remettre en question dans notre vie, de paresser sur YouTube juste parce qu’on n’a rien à faire (mis à part un livre de philo à lire) et même d’entretenir des débats sur la légitimité du dernier vidéoclip de Safia Nolin.
Le temps qu’on a pour faire tout ça, c’est une chance. Le temps avance, mais ce qu’on fait avec lui nous fait avancer aussi. Pendant que les femmes de l’Afrique subsaharienne se font encore exciser, nous, on se demande comment on va réussir à expliquer les nouveaux concepts d’identités de genre à notre grand-maman et ça, c’est une chance.
C’est vrai que se battre pour les droits humains, ça peut paraitre plus légitime que de débattre sur l’utilisation du mot « autrice », mais qu’est-ce qui définit vraiment l’importance d’un enjeu ? Peut-être le lieu où l’on est. Ceux qui se battent pour les droits de la personne sont de grands héros, mais s’ils font ce qu’ils font, c’est que la réalité de leur société nécessite de se battre pour des droits que nous avons acquis depuis longtemps.
Alors, si au Québec, on a le temps de réfléchir et de discuter (de manière civilisée s’il vous plait) de points qui semblent plus légers et anodins, c’est une excellente nouvelle, ça veut dire que notre société est en santé. Bien que les enjeux québécois puissent sembler moins nobles que ceux concernant les droits humains, ils ne le sont pas moins. Sans nos nombreuses polémiques, je ne pense pas que nos valeurs collectives tourneraient autour de l’ouverture d’esprit, de la tolérance et de la liberté.
On devrait davantage accueillir les controverses de notre jolie province comme un cadeau, même si parfois, elles nous découragent. Elles sont loin d’être sans importance, elles sont la base du progrès de notre société. Si en 2016 on critiquait l’habillement de Safia Nolin au gala l’ADISQ, en 2018, on accueillait une Klô Pelgag ornementée d’une moustache et ça les amis, si ce n’est pas ça le progrès, je ne sais pas ce que c’est.
Nous sommes privilégiés de vivre dans une société qui nous offre le temps de se quereller pour des enjeux qui paraissent frivoles, car ils font une grande différence et c’est eux qui définissent la ligne entre la société libre et ouverte d’esprit et celle qui ne l’est pas. Ne prenons rien pour acquis et regardons plutôt d’un œil intéressé les débats d’aujourd’hui, car demain, vous accueillerez peut-être comme une normalité ceux que vous refusez d’appuyer à l’heure actuelle.