« Un homme, à qui on interdit de se promener seins nus, quoi, c’est possible ? », diront certains. Ça semble si naturel qu’on oublie qu’à une époque, il était illégal pour les hommes d’avoir la poitrine découverte dans les lieux publics. Oui, oui, les hommes devaient porter des camisoles sous leurs chemises et même pour se baigner. Mais à quelle époque me direz-vous, les hommes ne pouvaient se promener torse nu librement? N’est-ce pas absurde ?
À ça, je répondrais que ce qui est absurde, c’est que ce soit encore le cas pour les femmes. Pourquoi n’en est-il pas de même pour la gent féminine ou pour les non binaires avec une poitrine ? Même si on voit de plus en plus de femmes s’émanciper de leur soutien-gorge, il reste toujours que le sein féminin est sexualisé.
Peut-être avez-vous déjà vu des hommes faire leur jogging dans les rues de votre quartier torse nu. Imaginez le contraire. Non c’est vrai, notre société ne peut pas se l’imaginer.
Mais où est le problème ? Peut-être se cache-t-il dans la publicité, le cinéma, la pornographie, ou bien juste dans les valeurs collectives inculquées dès l’enfance. Sans le vouloir, tout un chacun participe à créer ce blocage psychologique, car oui, c’est dans nos têtes que ça se passe, et non parce que c’est naturel.
On voit des personnalités publiques s’exposer et se délivrer du soutien-gorge. Voir Hubert Lenoir et Noémie D. Leclerc seins nus au gala l’ADISQ 2019 semblait peut-être provocateur, mais n’est-ce pas un petit pas pour la cause ? Reste qu’il semble légèrement plus facile pour les artistes d’agir de la sorte. C’est eux qui amorcent les modes, ils peuvent souvent les transformer en processus créatif, ce qui n’est pas le cas de tous.

Même si plusieurs femmes rêvent de s’émanciper du soutien-gorge, la barrière psychologique est parfois si grande qu’il leur en est impossible. Certaines ne pourront pas faire une journée normale si elle s’imagine que les autres peuvent voir la forme de leurs seins. Pour d’autres, c’est simplement que le soutien est nécessaire, car oui, ce n’est pas toutes les femmes qui portent du 28 A.
Évidemment, porter ou non une brassière, c’est un droit et ça devrait être un choix respecté de tous. C’est plus confortable pour certaines, ça permet de mieux respirer et c’est plus économique. Si mardi, une femme ne veut pas en porter, qu’elle le fasse, et si mercredi elle sent le besoin d’en porter une, qu’elle le fasse aussi. Le problème est simplement dans l’image négative et la vision du sein comme obscène. Mais d’où vient toute cette pudeur face aux seins féminins, qu’y a-t-il de pire que dans ceux d’un homme? Absolument rien, à mon avis, et c’est très malheureux qu’on se braque ainsi.
On dit que ce n’est pas pour demain qu’on verra des femmes seins nus dans un parc ou à la piscine municipale simplement, car c’est plus facile ainsi. Ça dégoute les gens, mais c’est dans leur tête. Ça parait insensé et inconcevable simplement parce qu’on se convainc que ce l’est. Alors, si nous reportons à plus tard en nous disant que nous ne sommes pas rendus là, nous ne le serons sans doute jamais.