L’objectivité, c’est l’un des premiers concepts que j’ai appris dans mes cours de journalisme. Faire abstraction de ses propres principes, valeurs et jugements afin de livrer un texte dénué d’opinion. L’idée est de donner toutes les clés aux lecteurs pour qu’ils se forgent leur point de vue sans être influencés par celui de quelqu’un d’autre. À l’occasion de cet article, j’avais envie de me prêter à l’exercice en traitant les deux camps, le pour et le contre d’un sujet controversé. Mon choix s’est porté sur le projet Énergie Saguenay.
Le contexte
Depuis 2014, l’entreprise GNL Québec fait des démarches pour construire une usine de liquéfaction de gaz naturel près de La Baie. Évalué à 9 milliards de dollars, le complexe serait relié à l’Ontario avec une longue conduite souterraine de 780 kilomètres élaborée par Gazoduq. Une entreprise soutenue par les mêmes intérêts financiers que GNL Québec. L’ambition est d’exporter 11 millions de tonnes de gaz naturel liquéfié (GNL) par an provenant de l’Ouest canadien pour subvenir aux besoins en énergie des marchés européens et asiatiques. Le projet est, toutefois, en train d’être jugé par le Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE), un organisme gouvernemental qui a la mission de donner des avis au ministre de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques à propos de divers projets touchant directement les citoyens. Celui-ci déposera son rapport au ministre au plus tard le 10 mars prochain, puis il sera disponible en ligne pour le grand public.
« L’argent ne pousse pas dans les arbres »
Le Saguenay-Lac-Saint-Jean est une région vieillissante. Selon l’Institut de la statistique du Québec, 32 % des citoyens seront âgés de 65 ans et plus en 2041, un des territoires les plus touchés par le vieillissement de la population. Un déclin que tente de réduire le Saguenay en attirant des jeunes avec différents projets, comme des formations exclusives, entre autres, évidemment, le programme d’Art et technologie des médias (ATM).
GNL Québec pourrait donner un sérieux coup de pouce à la main-d’œuvre régionale en générant 250 à 300 emplois tout en offrant des salaires compétitifs en moyenne de 110 000 $. De plus, Énergie Saguenay représenterait le plus important montant en retombées économiques régionales « jamais observé » au Saguenay-Lac-Saint-Jean, soit 23,5 % de l’investissement, c’est-à-dire 2,12 milliards de dollars.
« On n’est pas sorti du bois »
L’environnement et le développement durable sont au cœur des préoccupations des jeunes. Une constatation justifiée lorsqu’on s’aperçoit que les étudiants présents devant le BAPE se positionnaient à contresens du projet. En effet, les activités d’Énergie Saguenay pourraient mettre en péril la survie de plus de 30 espèces vulnérables de plantes et d’animaux. Parmi eux, la survie du béluga serait menacée à cause de l’augmentation du transport maritime dans le golfe du Saint-Laurent engendré par le projet.
D’ailleurs, les navires méthaniers inquiètent l’industrie touristique du Saguenay en raison de leur circulation quotidienne, près de 400 bateaux par année, qui pourraient dégrader la nature. L’image de marque de la région s’est forgée par son paysage côtier grâce à son fjord ainsi que l’estuaire du Saint-Laurent.
Le promoteur de GNL Québec affirme pourtant que l’usine soutient les efforts contre les changements climatiques, puisque les gaz naturels demeurent une meilleure option afin d’assurer la transition énergétique contrairement au charbon et au pétrole. Selon l’entreprise québécoise, le GNL est une source d’énergie sûre, parce qu’il est non toxique, non corrosif et inodore. En cas de fuite, le produit n’aurait aucune répercussion directe sur la faune et la flore. Cependant, des membres du regroupement Des Universitaires estiment l’exact opposé jugeant le projet incompatible avec une société écologiquement soutenable.
Maintenant que je vous ai donné les informations nécessaires pour que vous puissiez façonner votre opinion, sachez que ce texte n’est pas objectif. Il semble l’être, mais il contient une once de subjectivité. Le choix du sujet, le nombre d’arguments, les images et le titre sont des facteurs qui sont influencés par ma personne, donc mon parti pris. Avec Énergie Saguenay, on trouve d’un côté des acteurs économiques, tels que des politiciens, des municipalités, des entreprises et des syndicats de travailleurs, qui appuient le projet. Tandis que dans l’opposition, ce sont plutôt des scientifiques et des organismes environnementaux. Tout est une question de valeur. Laquelle prime sur l’autre pour vous : l’environnement ou l’économie. L’objectivité devrait plutôt être un idéal, mieux vaut considérer l’honnêteté des journalistes que leur regard sur les faits. Comme dit le chercheur et commentateur américain David Weinberger « Transparency is the new objectivity ».
Si vous voulez connaître mon avis sur le complexe de liquéfaction, soyez observateur en inspectant la page complète de l’article. Un petit indice : regardez bien l’image de couverture…
Sources
https://energiesaguenay.com/media/cms_page_media/68/Communiqu%C3%A9_CharteB%C3%A9lugas_VF10FEV.pdf