La virilité se définit comme étant l’ensemble des attributs et caractères physiques, mentaux et sexuels propres à l’homme. Gros gars, hétéro, fort et vigoureux. Un réel mâle alpha, et puis, stop! Être un homme, un vrai, c’est quoi au juste? La « masculinité toxique » est un de ces mouvements qui tend à mettre de l’avant les effets malsains de la conformité à certains idéaux générationnels des comportements masculins. Ce désir de créer un vent de changement dans notre société et de rebâtir l’identité de l’homme est une aspiration commune.
« Le discours sur la crise de la masculinité n’a rien de nouveau. C’est émergé aux États-Unis au début de l’an 1980 et c’était lié à un mouvement pour les hommes qui encourage une masculinité assez conventionnelle afin de chercher le guerrier intérieur. Les hommes s’isolent en forêt, autour d’un feu et sont confrontés à eux-mêmes. Les pères qui les accompagnaient évoquent une certaine violence en eux qui devait être disciplinée », raconte le professeur en science politique à l’Université de Montréal et l’écrivain du livre La crise de la masculinité de François Dupuis-Déri.
Emportée par un coup de bourrasque, la crise de la « masculinité toxique » s’installe en Amérique du Nord dans les années 1990. Petit à petit, les hommes réprimandent leurs droits à la féminité. Cependant, pour certains, l’homme fort est encore la méthode inculquée par les pères de famille dès l’enfance.
« En vieillissant, je remarque qu’il y a une nuance très importante qui a manqué dans mon développement et qu’il manque socialement, c’est l’écoute de nos volontés. J’ai aucune rancune envers mon beau-père d’avoir constamment été ferme, de n’avoir jamais eu d’affection envers-moi, d’avoir été rigide et d’avoir mis dans ma tête le mâle. C’est de cette manière qu’on l’a élevé, mais c’est le temps que ça change », confie le fondateur de la compagnie KOOL Apparel Juan Ricon.
Inspiré par son passé et son vécu, le jeune homme âgé de 24 ans a décidé de démarrer son entreprise de vêtements afin de briser les barrières traditionnelles associées à l’homme en transmettant un message bien précis.
« Notre défi avec KOOL c’est justement de briser ce silence interpersonnel et que cette écoute introspective devienne normale pour tous. On veut faire le pont en amenant ce qui manque à la perception de l’homme en émettant un discours moins catégorique. Le vêtement vise un message d’authenticité et de connaissance de soi. La centralité du message c’est l’effet du miroir KOOL qui fait “look” et qui est le rappel de regarder au-delà du reflet et des générations qui ont marqué le mythe de la virilité », explique Juan Ricon.
L’éducation, la solution?
Certains, comme Juan Ricon, pensent que la clé de ce changement se trouve dans les mains des nouvelles générations qui veulent élaborer une nouvelle pensée en éduquant autrement.
« Je suis professeur, donc je vous dirais que oui, l’éducation est un point tournant. En même temps, l’éducation ne peut pas tout faire. C’est d’abord une question de conscientisation et chacun à sa manière d’enseigner à leurs enfants ou leurs élèves. On ne peut pas espérer avoir un miracle du jour au lendemain », souligne François Dupuis-Déri.
Le professeur explique que l’abandon des cours d’éducation sexuelle est un des facteurs qui pourrait du moins affecter ce mouvement et avoir des impacts positifs sur la société et cette crise de la masculinité s’il était remis en place.
Impacts sociétaux
Hors de tout doute, la « masculinité toxique » n’est pas un terme propre à l’homme. Elle affecte toute la société et bien évidemment les femmes qui mènent une lutte.
« Au Québec, on se dit une société très avancée en termes d’égalité des sexes. Toutefois, les hommes qui se lamentent qu’ils sont en pleine crise et qu’ils souffrent parce qu’ils trouvent que les femmes prennent trop de place dans la société et bien ils ne prennent pas en compte qu’ils sont encore très avantagés », transmet François Dupuis-Déri.
Dans son ouvrage La crise de la masculinité, le professeur explique que partout et à toutes les époques on dénonce la montée en puissance des femmes et son corollaire, la crise de la masculinité, alors que les hommes sont tranquillement assis sur tous les postes de pouvoir dans la société, que ce soit le pouvoir politique, le pouvoir juridique, le pouvoir économique, celui de l’armée ou de la police.
D’un côté le mouvement des femmes serait plus légitime et d’un autre côté le mouvement des hommes pourrait continuer d’évoluer sur certains aspects.
Être un homme, un vrai, c’est de chercher l’équilibre entre force et douceur, puissance et générosité, confiance et humilité ainsi que protection et sensibilité. L’important même est de façonner sa vie et de rester fidèle envers ses valeurs.