Des chaussettes hautes jusqu’aux socquettes, rien de cela ne sera traité dans cet article. Un bas-bleu est un terme qui était employé pour mépriser les femmes qui s’intéressent aux choses intellectuelles telles que la littérature plutôt que la broderie.
« On permet au chroniqueur à barbe de traiter à peu près tous les sujets, mais il est des sentiers où, nous, femmes, ne pouvons-nous aventurer à moins de relever le bas de nos jupes afin de ne les pas traîner dans la boue […] » Cette citation digne des mots de la féministe française Simon de Beauvoir a pourtant été rédigée avant sa naissance par une icône bien de chez nous. La première femme journaliste canadienne-française, Robertine Barry.
Née en 1863 d’un père d’origine irlandaise et d’une mère canadienne-française, Robertine passe son enfance entre Les Escoumins et Trois-Pistoles. À 17 ans, ses parents l’envoient en pensionnat au Couvent des Ursulines de Québec. L’institution transmettait l’éducation la plus poussée à laquelle pouvaient aspirer les jeunes filles, qui les préparaient à devenir de parfaites épouses bourgeoises.
Toutefois, Robertine rêvait de devenir journaliste, une ambition qui semblait irréaliste puisque cette profession était seulement réservée aux hommes. Elle a réussi dans le climat hyperconservateur du 19e siècle à être embauchée par le rédacteur en chef de La Patrie, l’un des grands journaux de gauche de l’époque. Alors que toute femme qui travaillait était perçue comme s’abaissant et déshonorant sa famille.
Elle écrivait une chronique par semaine dans l’édition du lundi sous le pseudonyme Françoise, d’où vient l’extrait que j’ai utilisé au début de mon article. Franc, incisif et avant-gardiste. Les textes de Robertine traitent des droits des femmes, de la justice sociale, de violence familiale, du travail des enfants et de l’éducation.
Concernant sa vie personnelle, elle a renoncé au mariage pour embrasser le célibat. Un choix à double tranchant en raison des moqueries adressées aux célibataires, mais qui selon elle, valait mieux que d’endurer une union qui aurait brimé ses libertés. Aux yeux de la loi, une femme mariée redevenait mineure. Une violation des droits à l’égard des femmes qui n’est plus en vigueur depuis 1964 au Canada grâce à la loi sur la capacité juridique de la femme mariée.
Malgré son apport à différentes causes, Robertine demeure oubliée du grand public. J’espère qu’au cours des prochaines années, un virage s’opérera afin d’inclure plus de femmes dans nos livres d’Histoire pour que cette grande dame et plusieurs autres soient enfin reconnues à leur juste valeur.
Sources :
https://www.thecanadianencyclopedia.ca/en/article/robertine-barry-francoise
https://www.fondationlionelgroulx.org/Robertine-Barry-1863-1910.html