Confortable, rassurant, familier, le vintage fascine non seulement les nostalgiques, mais aussi les néophytes. Des tendances qui sont vouées à apparaître et disparaître perpétuellement. Un cycle sans fin selon l’étudiante en postproduction télévisuelle au Cégep de Jonquière, Jeannick Martins-Desjardins puisque « tout est fait pour revenir à la mode ».
À la recherche d’authenticité, Jeannick troque sa caméra numérique, lors de sa première session, contre un appareil photo argentique. Fébrile, elle exhibe son attirail de photographie. « Je me sens comme un enfant qui va te montrer ses jouets », affirme-t-elle sur un ton léger. Passionnée par le troisième art, ce passe-temps est un exutoire qui lui permet de replonger dans ses souvenirs. Elle reconnaît sur ses photos le grain et les imperfections des vieilles images de ses parents et de son enfance.
Grâce à des cours de perfectionnement, la future diplômée est devenue autonome de la prise de vue jusqu’au développement. Sa première caméra, elle l’a achetée pour la modique somme de 4 $ dans un bazar de sa ville.
D’un autre point de vue, direction le centre-ville de Kénogami au Big Bazar. Dès notre entrée dans la brocante, on a l’impression d’être transportés à une autre époque. Des murs tapissés d’affiches et de décorations colorées ainsi que des étagères pleines à craquer d’articles datant d’un passé fantasmé. « Je viens d’une famille qui n’était pas riche, on prenait soin de nos objets. Tout se réparait. […] On ne changeait pas de grille-pain à chaque deux ans », se remémore le propriétaire, Yves Leduc.
Un sentiment causé par l’obsolescence programmée, une véritable bombe à retardement. Également appelée « désuétude planifiée », c’est une stratégie marketing vicieuse qui consiste à réduire délibérément la durée de vie d’un produit afin d’augmenter le taux de remplacement. D’après un rapport réalisé en 2018 par l’organisme à but non lucratif Équiterre, 81 % des consommateurs canadiens ne font pas réparer leurs appareils électroménagers s’ils se brisent, et seulement une personne sur quatre estime qu’il est bon de faire réparer ses appareils électroniques. La majorité des clients préfère en acheter de nouveaux et contribuer à la culture du jetable au détriment de l’environnement.
Sensible à cet enjeu, Frédérik Beaudry, une élève en production télévisuelle s’est récemment créée un compte Instagram sur lequel elle vend des accessoires fabriqués à la main à partir de tissus principalement trouvés en friperie. Initiée par sa grand-mère, qui était couturière de métier, elle a baptisé sa machine à coudre en son honneur. Frédérik craint toutefois que cette pratique soit du passé, « parfois je me demande, est-ce que ça va s’éteindre ? ». La couture est en voie d’extinction. Un phénomène qu’elle a remarqué au sein de sa propre famille. « Ma mère ne sait pas coudre, c’est comme si ça avait sauté une génération », explique-t-elle.
Frédérik espère que ses créations vont contribuer au renouveau de cette tradition qui, de fil en aiguille, s’est perdue. Un souhait partagé par Jeannick et le propriétaire du Big Bazar. Une ruée vers le rétro qui suscite la joie des commerçants de seconde main comme M. Leduc… ou pas.
« Quand je les vends trop vite, je suis déçu. J’aimerais ça les contempler un petit peu plus longtemps. »