« En art-thérapie, on dit qu’on est trois, il y a le thérapeute, la personne et son image », relève l’art-thérapeute, Emmanuelle Dupuis. Qu’est-ce que l’art-thérapie, une approche novatrice qui remplace les thérapies conventionnelles?
Art-théraquoi?
L’art-thérapie est le terme pour désigner la thérapie par l’art. Cela peut englober également la musicothérapie, la dramathérapie et la danse-thérapie. Cependant, en Amérique du Nord, ce terme est réservé à l’approche des arts visuels, surtout l’art plastique tel que la peinture, le dessin, la sculpture… La thérapeute, diplômée de l’UQAT, émet que la démarche thérapeutique est créée à partir de l’image développé par le procédé artistique. Cette dernière relate que ce processus créatif est un agent important de l’évolution du patient.
Dans notre quotidien, nous axons, principalement, notre prise de décisions sur la logique. Alors, l’art-thérapie peut apporter une vision différente, une nouvelle façon de voir les choses. C’est la raison pour laquelle elle est riche en solutions.
Qui est concerné?
Lorsque nous pensons à l’art-thérapie, plusieurs vont avoir en tête que ceci est efficace surtout chez les enfants. Cette croyance est surtout alimentée par la démonstration de ce processus dans les films. En revanche, Emmanuelle Dupuis affirme que ce concept ne vise pas que les enfants. Il est profitable sur divers groupes d’âge, autant chez les enfants que chez les aînés. En plus, un art-thérapeute peut travailler avec une personne en particulier, mais également avec un couple ou un groupe de personnes.
À découvrir…
Cette branche thérapeutique est peu connue du grand public. Selon l’art-thérapeute, il y a plusieurs facteurs qui l’expliquent. Pour commencer, c’est une procédure assez récente. Cela fait environ 20 ans que cette pratique est enseignée au Québec. En outre, notre société ne met pas cette sphère de la thérapie de l’avant, il est donc difficile d’en apprendre davantage. Emmanuelle précise qu’il est difficile de définir ce qu’est l’art-thérapie, il est plus simple de comprendre ce que cela apporte lorsqu’on l’essaie.
« Les gens ne lui accordent pas nécessairement la même crédibilité qu’à des approches dites plus scientifiques, comme les approches psychologiques où il y a beaucoup d’études qui ont été faites » soulève Emmanuelle Dupuis. Il y a moins d’études et de résultats que la thérapie traditionnelle, par conséquent, ce domaine est encore en enrichissement.
Et la thérapie conventionnelle?
« Avec une psychothérapie verbale, il faut formuler une phrase. Pour exprimer une pensée, il faut passer par notre cerveau logique, le niveau rationnel, tandis que lorsque l’on passe par l’image, on connecte rapidement à l’émotion. Je trouve que les deux sont très complémentaires », relate Emmanuelle Dupuis.
Avec l’art-thérapie, le patient peut mettre en image une émotion ou une situation qu’il n’est pas capable de verbaliser. Le raisonnement est délaissé pour se concentrer sur l’imagination et la création. Par la suite, le patient peut regagner son côté plus rationnel pour donner un sens et une compréhension à son œuvre. Il n’y a donc pas de thérapie préférable, ces deux approches diffèrent l’une de l’autre et peuvent bien s’harmoniser.
Interprétation?
Emmanuelle a une approche humaniste de l’art-thérapie, elle priorise les ressources et les forces de chaque personne. Son rôle n’est pas d’interpréter l’art de son patient, mais bien de le guider dans son interprétation personnelle. Elle exprime que souvent le patient projette sa personne dans ses personnages. Les créations sont remplies de symboles dénoués des enjeux que la personne vit.
« Si j’affirme que l’utilisation du rouge est automatiquement liée à la colère, je peux faire fausse route, car pour la personne le rouge peut être de la passion, c’est peut-être complètement autre chose que de la colère. Ce n’est pas mon rôle de me positionner en experte qui interprète l’image », ajoute-t-elle. Il est donc important, pour elle, de comprendre la réalité de la personne.
En tant que thérapeute, Emmanuelle a accès au processus artistique de son patient. Elle remarque la pression mise sur les différentes couleurs, les gestes utilisés… Ces observations la mènent à questionner la personne sur son art et c’est à partir de ces questionnements que la personne peut interpréter son œuvre.
Art-thérapie à la maison?
Emmanuelle compare la pratique de l’art-thérapie à la maison à l’écriture d’un journal intime. Bien qu’écrire un journal puisse aider à extérioriser ses pensées, cet exercice ne se rapproche pas d’une séance de thérapie traditionnelle. Avec une art-thérapeute, la personne va avoir une meilleure compréhension de sa situation. La thérapeute est là d’un œil extérieur.
« La création artistique est thérapeutique en soi. Il suffit d’être en contact avec son processus créateur pour se remettre dans l’instant présent. Donc si nous avons tendance à ruminer le passer ou à anticiper le futur, de créer ça nous ramène dans l’instant présent et ça nous fait reconnecter à toutes nos ressources », indique l’art-thérapeute. Alors, sans pratiquer de l’art-thérapie en soi, expérimenter l’art plastique peut aider à se reconnecter à ses émotions. Lorsqu’une personne pratique l’art, elle a le pouvoir sur le matériau et le pouvoir sur sa création.