Le taux de participation au scrutin des élections provinciales est en diminution depuis les élections de 2012 au Québec. Il s’agit là d’un effet flagrant du désengagement citoyen envers les institutions politiques en place.
Avec une baisse de participation chiffrée à 8,15 % de 2012 à 2018, la santé de la démocratie au Québec est à surveiller. Pour l’enseignante en sciences politiques à l’Université Laval, Valérie-Anne Mahéo-Le Luel, ce phénomène s’explique en deux facettes. « Il y a évidemment plusieurs éléments de réponses, certains sont d’ordre contextuel alors que d’autres sont plutôt d’ordre générationnel. »
Taux de participation aux élections provinciales entre 2012 et 2018, Élections Québec.
Une question de contexte
La première piste d’explication réside dans le contexte en lequel le système politique évolue. La pandémie, qui sévit depuis 2020, a certainement son rôle à jouer dans la santé de la démocratie québécoise. « La pandémie a été problématique en ce qui concerne la gouvernance démocratique. Le gouvernement a gouverné par décrets et les partis d’opposition ont été marginalisés », relate Mme Mahéo-Le Luel.
D’une autre part, la place publique s’est vue assiégée par l’enjeu de santé publique dès le début de la crise sanitaire mondiale. Certains enjeux ont donc été mis de côté et cela explique aussi, en partie, la raison du désengagement de plusieurs groupes tel que l’avance l’enseignante en sciences politiques à Laval. « L’enjeu de la santé publique monopolise l’espace public […] certains enjeux ne sont même pas effleurés par les gouvernements en place, c’est le cas de l’environnement entre autres. »
D’un point de vue générationnel
Une deuxième piste d’explication s’offre lorsque l’on s’attarde à la réalité démographique de la participation citoyenne. « Le déclin de la participation électorale est principalement prononcé chez les nouvelles générations », affirme Mme Mahéo-Le Luel. Un changement de mentalité serait à la base même de cette tendance selon l’enseignante. « Les jeunes générations ont plus l’impression que voter est un choix plutôt qu’un devoir », confie-t-elle avec un certain désarroi bien dissimulé dans les moindres détails de son expression faciale.
Éduqué, mais désengagé
Phillipe Neault, enseignant du cours éthique et politique au Cégep de Jonquière, fait partie de ces gens qui ne participent pas à l’exercice démocratique. Pourtant bien à même de comprendre le système, la structure démocratique en place ne le rejoint pas. « Moi là-dedans, je ne me retrouve pas dans ce système-là, je ne me sens pas représenté par aucun des partis », affirme-t-il avec assurance, bien assis dans son bureau par un doux matin enneigé.
Phillipe Neault est également militaire lorsqu’il n’enseigne pas.
De sa vision des choses, le mode de scrutin au Québec est partie intégrante du problème. « Les gens ne réalisent pas que le gouvernement majoritaire est élu avec moins du tiers des votes au Québec. C’est une institution politique qui n’est pas représentative puis qui permet à une personne d’être pratiquement un roi pendant 4 ans », lance-t-il avec un sourire cynique, mais sincère.
M. Neault souhaiterait qu’une démocratie participative soit mise en place au Québec. Il juge cependant que les choses ne changeront pas de sitôt au sein de la population. « C’est le confort de l’indifférence, on est dans une vie confortable et on aime ça de même. Oui on chiale, mais dans le fond il n’y a personne qui veut de gros changements, voter pas voter ça change tu de quoi, bof », conclut-il avec un air pessimiste en fixant le plancher d’une mine renfrognée.